Chamak B. Les nouvelles représentations parentales de l’autisme. In Recherches en psychopathologie de l’enfant, sous la direction d’Odile Bourguignon et Monique Bydlowski, ERES, 2019, p. 163-177.
Extrait de l’article : « Les changements de représentations de l’autisme ont fait l’objet de mes recherches en sociologie et anthropologie de la médecine depuis 2002. Dans ce chapitre, je traiterai en particulier des transformations des revendications des associations de parents en lien avec les nouvelles conceptions professionnelles et les témoignages de parents d’enfants, d’adolescents et d’adultes autistes. Ces changements sont liés à la volonté de rompre avec les hypothèses qui se sont largement diffusées à partir des années 1960 et qui impliquaient des problèmes relationnels entre la mère et l’enfant comme source d’autisme. Une autre motivation est celle de combattre une vision négative, sans espoir, de l’avenir de leur enfant. Les nouvelles représentations produites au début des années 1990 se sont nourries de la montée de l’objectivisme, illustrée par les nouvelles classifications américaines et internationales des maladies fondées sur la description des comportements, ainsi que sur les hypothèses génétiques et neuroscientifiques et la promotion des méthodes comportementales. Ces changements trouvent également leur source dans le poids accru du rôle des associations depuis les années 1990 (Barthélémy, 2000). Dans le contexte de la désinstitutionalisation et de la généralisation des valeurs de l’autonomie à l’ensemble de la vie sociale, le mouvement des associations de parents s’est amplifié et de nombreux parents ont voulu s’émanciper du pouvoir qu’ils jugeaient trop important des psychiatres dont ils remettaient en question les décisions et les interprétations. Ce contexte se caractérise par l’ancrage, dans la vie quotidienne, d’un double idéal de réalisation de soi et d’initiative individuelle, c’est-à-dire la capacité de décider et d’agir par soi-même (Ehrenberg, 2005). Les nouvelles représentations parentales de l’autisme se sont ainsi structurées autour de l’autisme comme un problème neuro-développemental en grande partie d’origine génétique. L’élargissement des critères diagnostiques et le diagnostic précoce ont été réclamés, ainsi que l’intégration scolaire et la généralisation des méthodes éducatives et comportementales intensives. Par ailleurs, et pour s’éloigner de l’image stigmatisante de la maladie psychiatrique, le terme « handicap » a été revendiqué pour caractérisé l’autisme.»